Une nation autochtone et des ONG représentant des milliers de personnes du Maine et du Nouveau-Brunswick s’unissent pour soutenir la décision d’Énergie NB d’éliminer le barrage de Milltown, la plus ancienne installation hydroélectrique du Canada, afin de rétablir le libre écoulement du cours inférieur de la rivière Skutik (Sainte-Croix).
L’élimination du barrage fait partie d’un effort concerté de restauration globale de la rivière, qui comprend le rehaussement de l’habitat et la planification d’une amélioration du passage des poissons à d’autres barrages et barrières installés le long du bassin hydrographique. Pour assurer la réussite de cette restauration, il faut veiller à ce que les poissons anadromes (qui se déplacent entre l’océan, les rivières et les lacs) puissent accéder à leur habitat naturel.
Le chef Hugh Akagi de la Nation Peskotomuhkati de Schoodic soulignait l’importance de la rivière Skutik pour l’écosystème et les habitants du territoire de Peskotomuhkati en rappelant que, depuis au moins 13 000 ans, la rivière Skutik est au cœur du territoire et de la vie culturelle et spirituelle de la tribu Peskotomuhkati, et que les saumons, les gaspareaux, les harengs, les marsouins et de nombreuses espèces de poissons de fond, comme la goberge et la morue, qui fréquentent la rivière Skutik et son estuaire, revêtent une importance cruciale pour la vie et l’alimentation traditionnelle de la tribu Peskotomukati.
Selon Allen Curry, qui travaille à l’Institut canadien des rivières et à l’Université du Nouveau-Brunswick, le travail de restauration de la rivière Skutik (Sainte-Croix), dont l’élimination du barrage de Milltown, ainsi que les nombreux autres efforts d’amélioration de l’habitat se traduiront par des avantages considérables pour toute la région, du sommet du bassin hydrographique, situé à l’étranger, à l’embouchure de la rivière à la baie de Passamaquoddy, et jusque dans la baie de Fundy et le Golf du Maine.
Ce n’est que relativement récemment, depuis l’introduction de pratiques industrielles telles que l’exploitation forestière, la construction de barrages et la production de pâtes et papiers, que la rivière et les eaux côtières ont été détériorées par la pollution et les espèces envahissantes, et que les espèces sauvages indigènes n’ont plus pu accéder à leur habitat naturel.
Or, la rivière et ses poissons constituent un riche patrimoine pour les collectivités néo-Brunswickoises non autochtones également. Dans son ouvrage intitulé Report on the Sea and River Fisheries of New Brunswick, paru en 1851, l’avocat, naturaliste et auteur de St. Stephen, Moses Perleybook, écrivait que, dans les années 1820, des poissons comme le gaspareau et l’alose vraie, étaient si nombreux qu’on pensait qu’ils subsisteraient à jamais. Dans les années 1850, cependant, des sous-produits de pratiques industrielles, comme l’exploitation forestière, la construction de barrages et la production de pâtes et papiers, représentaient une menace telle pour la rivière que Perley déplorait qu’il serait hautement répréhensible de permettre l’extinction des pêcheries de cette rivière, alors menacée d’un anéantissement total.
Toutefois, les efforts dirigés par la nation de Peskotomuhkati pour restaurer la rivière Skutik ont récemment été couronnés d’un succès remarquable. L’un des premiers bénéficiaires de cette initiative est le gaspareau, qui semble maintenant en bonne voie d’être rétabli à des niveaux sans précédent. Durant l’été 2019, plus de 480 000 gaspareaux, un poisson qui, selon le Conseil international de la rivière Sainte-Croix, est l’un des principaux indicateurs de la santé environnementale de la rivière, sont revenus dans la rivière Skutik; ce nombre était deux fois plus élevé que celui de l’été précédent, et bien supérieur au record moderne de 900 poissons enregistré en 2002.
« Comme nos collectivités côtières dépendent dans une telle mesure de la santé des eaux marines pour promouvoir le dynamisme des pêcheries et du tourisme, eux-mêmes tributaires des baleines et des oiseaux de mer, entre autres mammifères, il est important que nous prenions soin des espèces au bas de la chaîne alimentaire, comme les gaspareaux, pour assurer la prospérité des collectivités côtières qui longent la baie de Fundy et le Golf du Maine », affirme Matt Abbott, sentinelle de la baie de Fundy auprès du Conseil de conservation du Nouveau-Brunswick.
Les Gaspareaux sont considérés comme une espèce clé en raison du rôle critique qu’ils jouent tant pour les ressources d’eau douce que pour les écosystèmes marins. Ces poissons, qui se déplacent en grands bancs, servent de nourriture aux poissons de fond, comme la goberge et la morue, à bon nombre d’espèces de poissons océaniques, à des oiseaux et à des mammifères marins, dont les marsouins, les phoques et les baleines. Les bancs de gaspareaux protègent aussi des prédateurs les jeunes saumoneaux durant leur migration. Les poissons sont une source alimentaire directe pour les personnes et servent d’appât aux pêcheurs de homards.
« Dans le Maine, la Fédération du saumon atlantique (FSA) a montré que l’élimination des barrages avait entraîné le retour de millions de poissons anadromes comme le hareng, l’alose vraie, l’anguille et le saumon sauvage de l’Atlantique. Notre travail a suscité un vaste soutien du public et nous pensons que l’élimination du barrage de Milltown peut se révéler bénéfique pour la collectivité et stimuler le rétablissement d’une importante voie navigable internationale », se réjouit John Burrows, directeur exécutif des programmes américains de la FSA.
« Nous sommes actuellement confrontés à la double crise du déclin de la biodiversité et du changement climatique et, aujourd’hui plus que jamais, nous devons être déterminés à prendre les mesures nécessaires pour restaurer nos systèmes d’eau douce menacés. Nous sommes encouragés par le choix audacieux d’Énergie NB de désaffecter le barrage de Milltown, de réduire le débit écologique de la rivière Sainte-Croix et de promouvoir le rétablissement des espèces critiques », déclare Elizabeth Hendriks, vice-présidente de la conservation de l’eau douce auprès de WWF Canada.
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Pour plus d’information, ou pour obtenir une entrevue, veuillez communiquer avec :
Matt Abbott, sentinelle de la baie de Fundy, Conseil de conservation du Nouveau-Brunswick | matt.abbott@conservationcouncil.ca | 506-321-0429
Neville Crabbe, FSA, Communications | ncrabbe@asf.ca | 506-529-1033
Alexandra del Castello, WWF-Canada | adelcastelo@wwfcanada.org | 647-246-6996