Questions fréquemment posées concernant les petits réacteurs nucléaires modulaires (PRM) :
Les petits réacteurs nucléaires modulaires (PRM) sont encore une technologie expérimentale qui s’accompagne d’un risque financier et environnemental substantiel. Actuellement, il n’y a qu’un seul PRM opérationnel dans le monde entier. Décrit comme un « prototype fonctionnel », ce réacteur se trouve sur une barge en Russie. Il a fallu plus d’une décennie de plus que ce qui était initialement prévu pour mettre ce prototype en service, et on a observé des retards similaires dans le cadre de projets expérimentaux développés en Argentine et au R.-U..
NuScale Power, une entreprise américaine située à Portland, dans l’Orégon, qui souhaite construire un ensemble de 12 réacteurs sans carbone à Idaho Falls affiche un scénario que l’on retrouve constamment lors de projets nucléaires : un doublement des coûts prévus, soit, en l’occurrence, de trois à six milliards de dollars, et un retard dans la date d’achèvement qui, dans ce cas, est passée de 2026 à 2030. Les organismes réglementaires ont aussi cerné des problèmes au niveau de la réglementation.
Le développement continu de cette technologie expérimentale nécessiterait des millions de dollars supplémentaires sous forme d’aide financière et de subventions gouvernementales. En d’autres termes, il est peu probable que les nouveaux réacteurs nucléaires puissent être concurrentiels par rapport à des technologies plus rentables comme les énergies solaire et éolienne et les sources d’énergie garantie comme les barrages hydro?électriques de la région de l’Atlantique.
Il est peu probable que les PRM accélèrent l’élimination du charbon au Nouveau-Brunswick et, suivant les risques technologiques qu’ils posent, ils pourraient, en fait, retarder encore plus l’atteinte de cet objectif.
Selon la Feuille de route des petits réacteurs nucléaires de Ressources naturelles Canada, si le Nouveau-Brunswick va de l’avant avec les PRM, il se pourrait que nous devions attendre jusqu’en 2030, au moins, avant de pouvoir tirer de l’électricité utilisable de ces projets expérimentaux. Pour lutter contre le changement climatique et atteindre l’objectif planétaire de faire passer le réchauffement au-dessous de la barre des 1,5°C, le Nouveau-Brunswick doit agir rapidement pour éliminer le charbon de la production d’électricité d’ici à 2030, au plus tard.
L’un des promoteurs néo-brunswickois de ce projet expérimental, ARC Canada, tente de rendre un réacteur de 100 MW fonctionnel d’ici à la fin de 2028, soit moins de deux ans avant la date butoir à laquelle le Nouveau-Brunswick doit avoir éliminé l’électricité au charbon. Cependant, vu la nature expérimentale du projet, et les retards déjà constatés en Russie, au R.-U., en Argentine et juste au Sud de la frontière, dans l’Idaho, le Nouveau-Brunswick prend un risque substantiel en partant du principe qu’il respectera les délais fixés. Or, nous ne pouvons pas nous permettre de retarder la transition vers une énergie abordable, fiable et durable, et nous ne pouvons pas nous permettre de courir les risques associés à des retards plus importants avec des technologies non éprouvées.
Les technologies comme les énergies éolienne et solaire et l’efficacité énergétique sont toutes des technologies éprouvées au cœur de centaines de projets menés à toutes les échelles, pour toutes sortes d’applications et dans toutes les régions du Canada.
Depuis 2009, le coût de l’énergie éolienne a baissé de plus de 70 % au Canada et le coût de l’énergie solaire et du stockage en batterie a diminué d’environ 90 % durant la même période. En fait, les énergies solaire et éolienne sont les formes d’électricité les plus abordables de la Terre. Cinq fois moins chères que le charbon, cinq fois moins chères que l’énergie nucléaire traditionnelle et trois fois moins chères que le gaz naturel. En revanche le coût de construction des grands réacteurs nucléaires a augmenté d’environ 40 % depuis 2013 seulement, et le coût inférieur suggéré des PRM n’a, pour l’instant, aucun fondement établi.
Un thème revient régulièrement avec les PRM expérimentaux, et avec l’énergie nucléaire en général : les dépassements de coût. Le coût du petit réacteur modulaire flottant russe a plus que quintuplé par rapport à son coût initial estimé : il est passé de 140 millions de dollars à plus de 740 millions de dollars. Les PRM chinois, actuellement en construction, ont déjà vu leur coût doubler. De plus, en seulement deux ans, le projet de PRM de NuScale, dans l’Idaho, a aussi vu son coût prévu doubler, de 3 milliards de dollars à 6,1 milliards de dollars. L’allégation selon laquelle les PRM sont moins chers n’est qu’une spéculation et ne repose sur aucun fait établi. N’oublions pas que la moitié de la dette d’Énergie NB provient de la remise à neuf de l’usine nucléaire de Point Lepreau.
Bien que, d’un point de vue théorique, les PRM soient plus sécuritaires que les grandes usines nucléaires traditionnelles en raison de leur modularité (construits dans une usine puis expédiés), de leur conception intrinsèquement plus sécuritaire (moins de pièces mobiles) et de leur petite taille, ils présentent des risques substantiels pour la sécurité lors de leur transport, de leur utilisation et de l’entreposage des déchets nucléaires; de plus, il faut régler les questions de sécurité concernant la conception de NuScale . Or, les pires scénarios d’échec des projets fondés sur les énergies solaire et éolienne ou le stockage d’énergie sont, par comparaison, négligeables. On pourrait même dire qu’un « déversement d’énergie solaire » est simplement belle journée.
Bien qu’on tente de promouvoir les PRM en les faisant passer pour une solution de rechange aux grandes centrales nucléaires, ils produisent tout de même de grandes quantités de déchets radioactifs. Des déchets pour lesquels nous devrons continuer de payer et d’assurer un entreposage sécuritaire dans bien plus d’endroits qu’aujourd’hui, et ce, durant des milliers d’années. De plus, en créant de nouveaux réacteurs nucléaires au Nouveau-Brunswick et dans le monde, le Canada accroît d’autant plus les craintes relatives à la prolifération des armes nucléaires en distribuant des déchets nucléaires et du plutonium sur son propre territoire et dans le monde entier.